lundi 14 mars 2016

Les emprunts dits toxiques de Dexia, on en parle ?

Il ne fait pas bon défendre les méchants banquiers. Surtout ceux qui, parce que leur banque n'était pas très bien gérée, auront coûté des milliards au contribuable, en terme de recapitalisation. 
C'est le cas de Dexia, banque, notons le, semi publique, qui, à la différence de BNP Paribas de la Société Générale, nous aura coûté cher : 6.6 milliards d'euros dès 2013, selon la Cour des Comptes (1). 

Mais outre le fait que cette banque, contrôlée depuis des années par des hommes politiques pourtant de haut niveau comme Jean-François Copé (dans les années 1990's) ou plus récemment François Rebsamen (En 2007 et 2008, il est administrateur de Dexia-Crédit Local (2)), était mal gérée, elle est surtout connue pour avoir vendu à des collectivités locales les fameux "emprunts toxiques" (3)




Un emprunt, tout le monde c'est ce que c'est : vous avez un projet à financer, vous allez voir une banque pour emprunter, et vous remboursez des mensualités qui comprennent le principal du prêt, et des intérêts. Notons, c'est important de le préciser, que personne n'est obligé d'emprunter. Il n'y a rien qui force un particulier à acheter son logement à crédit, tout comme il n'y a rien qui force un député-maire à payer la piscine municipale, la salle omnisport, les ronds points, un palais des congrès ou une ligne de tram à crédit. 

Il y a, pour les particuliers comme pour les entreprises ou les collectivités, deux grandes catégories de prêts : à taux fixes ou à taux variables. Les français, dans leur immense majorité, ont privilégié les taux fixes, notamment à cause de la sécurité qu'ils apportent en terme de visibilité. 
Seulement, à l'aube des années 2000, des politiciens, souvent de ceux qui dénoncent "la finance exubérante", les "innovations financières folles", "les marchés débridés" et autres "adversaires sans visage", ont cru être plus malins que les autres, en empruntant à taux variables : c'est l'affaires des  emprunts structurés, dits "toxiques". 
Globalement, un emprunt structuré dit toxique a des chances (mais pas la certitude) de ressembler à un prêt subprime : doux au début, violent à la fin quand les condition changent. 
Et ce que nous racontent les gentils politiciens au service de leurs intérêts de l'intérêt général, c'est qu'ils ne savaient pas, qu'ils se sont faits avoir par les méchants banquiers, qu'ils ont été bernés. 

Ce type de défense,  les gentils politiciens bernés par les méchants banquiers vendeurs d'emprunts structurés, dits "toxiques", pose un problème : elle risque de confirmer l'incompétence des fonctionnaires en charge des finances et des politiciens qui les supervisent. 
En effet, quand 97 % de la dette de la Seine-Saint-Denis s'est composée d'emprunts structurés, qui a forcé Claude Bartolone à signer ces crédits ? 
Et quand ce même Claude Bartolone porte plainte contre Dexia, que dit-il, si ce n'est, au choix, que : 
  • soit les fonctionnaires de Seine Saint Denis en charge des finances, des Bac + 5 en finance publique recrutés sur concours, sont incompétents
  • soit que ces fonctionnaires savaient ce qu'ils faisaient mais que les politiciens qui ont pris les décisions ont sciemment pris trop de risques
Bref, Claude Bartolone envoie un très mauvais signal (4). 

En plus d'être mauvais, ce signal est faux en ce qui concerne la première proposition, celle de l'incompétence des fonctionnaires. Une étude universitaires récemment publiée montre que les collectivités qui ont eu recours aux emprunts structurés, dits "toxiques" ne sont pas des petits villages dirigés par des maires lambda, mais les plus grosses collectivités, dirigées par des politiciens formés, censés être compétents, et entourés de conseillers. 

Oui, en matière d'emprunts toxiques : certains élus locaux savaient ce qu’ils faisaient (5). C'est un professeur de finance de Harvard, qui a co-écrit « The Political Economy of Financial Innovation : Evidence from Local Governments » (6) , qui l'affirme. 



En réalité, les emprunts structurés, dits "toxiques" ne sont que l'actualisation d'un vieux proverbe bien connu : "après moi, le déluge", et une variation autour du thème du cycle politique de la dépense publique. On le sait, les élus aiment rendre rapidement visibles les effets de la dépense publique tout en repoussant le cout, de préférence en la faisant payer par d'autres. 

Pourquoi la ville de Saint-Etienne ne s'est pas tout simplement dit qu'elle n'avait pas les moyens de faire un tram ? Pourquoi le département de Seine Saint Denis n'a pas ajusté sa dépense publique au potentiel fiscal de ses contribuables ? 
Et pourquoi les politiciens comme le sénateur maire PS François Rebsamen n'ont jamais eu à répondre de leurs actes ? 

Telles sont quelques unes des questions auxquelles les politiciens comme Claude Bartolone ont à répondre. Ca fait quand même 5 ans que les contribuables sont exposés au risque Dexia (7). Il est temps d'avoir des explications 



(3) Libération Carte des emprunts toxiques 
(4) Le Parisien Libéral Banques : la Seine-Saint-Denis donne un mauvais signal 11 février 2011
(7) Contribuables Associés Emprunts toxiques : 5500 collectivités locales concernées 21 septembre 20111

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